Le 31 octobre 1984, voilà exactement 38 ans, Indira Gandhi, Première ministre de l'Union indienne, est assassinée par ses propres gardes du corps, des Sikhs ralliés à la cause indépendantiste.
Fille unique du père de l'indépendance de l'Inde, Nehru, elle n'a aucun lien avec le mahatma Gandhi, mais doit son nom à son mari, Feroze Gandhi, avocat parsi, qu'elle épouse contre la volonté de sa famille.
Née en 1917, elle s'implique dès sa jeunesse dans la lutte, organisant à 12 ans un grand rassemblement d'enfants contre l'occupation britannique ! Après sa formation à Oxford, elle accompagne son père dans ses déplacements lorsqu'il devient Premier ministre de l'Union indienne, en 1947. En 1959, elle prend la présidence du parti du Congrès.
Lorsque son père meurt en 1964, elle entre dans le gouvernement de son successeur comme ministre de l'Information et de la Communication. En janvier 1966, elle devient à son tour Premiere ministre, un poste qu'elle exerce jusqu'en 1977, puis de 1980 à sa mort.
À la tête de la plus grande démocratie du monde, elle poursuit l'œuvre de son père, dont elle reprend aussi volontiers le style autoritaire. Son objectif est de moderniser l'Inde, selon des principes inspirés par le socialisme.
La « révolution verte » prend son plein essor et permet à l'Inde de devenir autosuffisante sur le plan agricole, et même exportatrice.
Elle s'emploie aussi à renforcer la position de son pays sur la scène internationale et lance en 1967 un programme destiné à le doter de l'arme atomique. Le premier essai, réussi, a lieu en 1974.
Elle mène et remporte en décembre 1971 une guerre contre le Pakistan qui contraint ce dernier à reconnaître l'indépendance du Bangladesh. En conséquence du rapprochement entre la Chine, le Pakistan et les États-Unis, Indira Gandhi resserre les liens avec l'URSS, tout en continuant à défendre le non-alignement.
En 1975, son élection au parlement est invalidée pour une série d'irrégularités. Refusant de démissionner, elle proclame l'état d'urgence et gouverne par décrets. La presse est censurée et les opposants sont arbitrairement emprisonnés, voire torturés. Une campagne pour limiter la croissance démographique dégénère et entraîne de nombreux cas de stérilisation forcée.
Deux ans plus tard, elle convoque des élections qu'elle est certaine de remporter. Énorme erreur ! Elles tournent au désastre pour le parti du Congrès, divisé, et Indira Gandhi n'est même pas réélue au Parlement.
C'est l'acharnement contre elle de ses adversaires qui va lui permettre de rebondir : elle est arrêtée pour avoir tenté d'assassiner des opposants et incarcérée pendant deux semaines. Mais son procès en 1979 lui permet de regagner sa popularité, alors que la coalition de ses rivaux implose. Les élections de janvier 1980 sont un triomphe pour le parti du Congrès, et Indira Gandhi redevient Première ministre.
Son deuxième mandat est marqué par les tensions avec la communauté sikh, implantée surtout au Pendjab, au nord de l'Inde, qui revendique plus d'autonomie et commet plusieurs attentats. Adeptes d'une religion monothéiste vieille de cinq siècles seulement, les Sikhs, au nombre d'une quinzaine de millions, se sont acquis une réputation de redoutables guerriers dans leur combat contre les roitelets musulmans.
Le 5 juin 1984, l'armée indienne pénètre dans le temple sacré d'Amritsar où se sont retranchés plusieurs centaines de Sikhs, et ouvre le feu, faisant au total plusieurs centaines de morts, y compris parmi les pèlerins. Le drame est tenu secret par la presse. En vain.
C'est pour venger ce massacre que deux gardes du corps assassinent Indira Gandhi avec leurs armes de service dans le jardin de sa résidence, le 31 octobre 1984. En réaction, environ 3 000 Sikhs sont lynchés dans les jours qui suivent, aggravant encore les tensions religieuses.
« Si je meurs aujourd'hui, chaque goutte de mon sang fortifiera la nation » Pressentiment ? Affirmation que rien, pas même le crime, ne saurait la détourner de ce qu'elle concevait comme une mission politique ? Quelles qu'en aient été les raisons profondes, cette phrase prononcée en public par Indira Gandhi la veille même de son assassinat, le 31 octobre 1984, illustre parfaitement l'état d'esprit qui l'habitait quand est morte celle qu'une partie de son peuple avait pris l'habitude d'appeler « la mère de l'Inde ». Sa fin tragique lui confère d'un coup la densité d'un personnage de légende. Son assassinat lui a, en un sens, ouvert les portes de l'histoire.
Reste, pour expliquer le crédit dont dispose Indira Gandhi aux yeux du monde, l'image qu'elle a imposée d'elle-même et de son pays, image faite sans doute de détermination, de courage, d'indépendance. On a parfois coutume de dire que les grands hommes le sont souvent plus à l'étranger que chez eux. Cela pourrait être le cas avec Indira Gandhi. Dans le droit fil de celle de son père, sa politique étrangère a servi de référence à toute une génération de pays plus ou moins neufs, attachés au non-alignement, à l'essor de leur indépendance politique et économique, au refus des blocs. C'est probablement dans ce domaine que la politique d'Indira Gandhi a été le plus couronnée de succès.
Le fils d'Indira, Rajiv Gandhi, lui succédera comme Premier ministre. Mais il sera également assassiné, par une kamikaze tamoul, le 21 mai 1991. Comme sa mère, il soutenait en effet le gouvernement du Sri-Lanka dans sa lutte contre les « tigres tamouls ».
La famille Gandhi ? une sorte de famille Kennedy à l'indienne !
Ce même 31 octobre mais en 2009, disparaissait Claude Lévi-Strauss, écrivain et anthropologue, auteur de Tristes tropiques, et père du structuralisme
mais c'est une autre histoire !
Version audio avec illustration musicale à écouter sur Radio Pays d'Hérault ICI