« Fascistes locaux fermement opposés à pacification, qu’ils considèrent comme fatale au développement de leur programme agraire. Socialistes plutôt favorables en revanche à l’idée de pacification mais peu confiants . . . Communistes et anarchistes contres. Populaires la voient d’un bon œil, mais ne se manifestent pas concrètement. Libéraux et radicaux demeurent absents. La presse n’ose pas se prononcer par crainte Faisceaux ».

Télégramme du préfet de Bologne Cesare Mori au ministère de l’intérieur, 12 juillet 1921

 

Le premier discours de Mussolini transporte au parlement le système de lutte des fascistes. Le plan d’apprivoisement a échoué.

« Il ne me déplaît pas, chers collègues, de commencer mon discours aux bancs de l’extrême droite où plus personne n’osait s’asseoir à l’époque où le commerce de la bête triomphale socialiste se portait fort bien. Je le déclare sans tarder, je soutiendrai dans mon discours des thèses réactionnaires. Mon discours sera antidémocratique et antisocialiste ».

 Dans les cercles politiques libéraux et industriels, des hommes influents et expérimentés se mordent les doigts.

Mussolini consacre les trente premières minutes de sa première intervention parlementaire à un dur réquisitoire contre la politique de Giolitti. Le président du conseil est déjà liquidé, son gouvernement nouveau-né n’a que quelques jours à vivre.

Vis-à-vis des socialistes Mussolini manie la carotte et le bâton. Qu’ils se résignent : c’est vers la droite que va le monde et non vers la gauche, l’histoire du capitalisme n’en est qu’à ses débuts. S’ils désarment les esprits, les fascistes désarmeront.

La violence n’est pas un sport. Le triste chapitre de la guerre civile peut se conclure. Nous sommes humains, et rien de ce qui est humain ne nous est étranger.

Les applaudissements s’élevant de la droite sont très vifs, réitérés, les félicitations nombreuses, les commentaires prolongés.

Les semaines qui suivent Mussolini propose un pacte simple et délirant : se réconcilier avec les socialistes.

Ce projet porte le nom de « pacte de pacification ». Les squadristes des provinces l’ont boycotté.

A présent, la situation a changé. Giolitti est tombé. Il a été remplacé par Ivanoe Bonomi, lequel bien qu’il soit issu du socialisme, a réussi à attirer dans son gouvernement les catholiques du parti populaire.

Si Bonomi parvient à embarquer également les socialistes modérés, ils s’uniront tous contre les fascistes, et ce sera la fin pour ces derniers.

Il faut briser cet isolement, il faut abandonner « l’exterminisme ».

Les membres du comité central des faisceaux de combat écoutent en silence les instructions que Mussolini distribue pour exécuter sa marche arrière précipitée : fin de toute violence individuelle, interdiction de toute expédition punitive, examen des antécédents pénaux des adhérents, destitution des fascistes de la dernière heure placés aux postes de commandement, enquête sur les responsabilités des actions nuisibles.

Face à ces propositions, la discussion se déchaîne. Tous les chefs des provinces sont des opposants résolus à une pacification avec les rouges.

Le Duce s’adresse à eux « Il n’y aura pas de schismes. Nous sommes une armée, non un essaim. Et cette armée, c’est moi qui la commande . . . ».

 

( Extraits de lecture du livre d’Antonio Scurati ‘’M’’ l’enfant du siècle aux éditions Les Arènes )

 

Chaque mardi en exclusivité sur EVAB, vous avez rendez-vous avec la série ‘’M’’ qui va vous faire revivre les évènements qui ont fondé le fascisme en Italie, au siècle dernier.