En France aussi les milliardaires libertariens s’organisent ! Comme aux USA ces dernières années, ils se focalisent sur les médias. Ces dernières semaines ont vu le rachat d’un groupe de presse, d’une école de journalisme, la nomination de profils inquiétants.

Le groupe de presse et d’édition « Bayard », qui compte 1300 salariés, vient d’être racheté par le milliardaire catholique intégriste, libertarien et exilé fiscal Pierre-Édouard Stérin. Son premier acte a été de placer aux postes de commandes ses hommes de main.

François Morinière est ainsi devenu le patron du groupe de presse « Bayard ».

Morinière c’est aussi le patron du programme d’évangélisation et le président du fonds de dotation « Nuit du bien commun » piloté depuis 2017 par Stérin qui finance des écoles privées hors contrat et lutte contre le droit à l’avortement.

Ce même Morinière vient d’embaucher Alban du Rostu en tant que « Directeur de la stratégie et du développement » du groupe « Bayard ».

Du Rostu c’est l’autre éminence grise de Stérin. Il figure parmi les fondateurs et administrateurs du plan « Périclès ». Plan « Périclès » qui vise à promouvoir des valeurs conservatrices, l’union des droites extrêmes et faire gagner les élections. De l’aveu même de ses concepteurs « Périclès » est l’acronyme de : Patriotes, Enracinés, Résistants, Identitaires, Chrétiens, Libéraux, Européens, Souverainistes. Joignant la théorie à la pratique du Rostu a proposé des renforts à Éric Ciotti en juin dernier pour constituer ses listes d’alliance avec le RN.

Pour boucler la boucle chez « Bayard » Béatrice d’Aligny (née du Rostu) la sœur d’Alban va occuper le poste de rédactrice en chef.

Autre attaque libertarienne et non des moindres, celle d’un consortium de milliardaires qui vise à racheter l’École Supérieure de Journalisme de Paris (ESJ). Aux commandes de cette OPA on retrouve tous les patrons de presse français les Bolloré, Arnault, Dassault, Gattaz, Saadé.

Vincent Bolloré et les milliardaires libertariens français vont donc façonner la formation des journalistes. Ils avaient déjà entamé ce processus en créant en 2018 « L’Institut libre du journalisme » qui cherchait à concurrencer les écoles reconnues dans la profession. Bolloré et Stérin étaient déjà les chevilles milliardaires de ce projet.

Pour diriger l’ESJ les milliardaires libertariens ont choisi Vianney d’Alençon entrepreneur ultra catholique d’extrême droite. Leur projet politique affiché est de faire une école « non woke », pro-entreprises et économie de marché.

Vianney d’Alençon commence sa vie professionnelle en vendant des bondieuseries sous forme d’alliances, chevalières et médailles de baptême en créant « Laudate » en 2011.

« Laudate » revendique le versement de 5 euros par médaille à la formation « Jérôme-Lejeune » qui est farouchement opposée à l’avortement.

L’autre spécialité de Vianney d’Alençon, c’est le rachat de châteaux.

Dans le premier château, racheté en 2016 (la forteresse Saint-Vidal près du Puy-en-Velay) il propose un spectacle très orienté sur l’histoire de France.

Dans le second, racheté en 2019 (château de la Barben près d’Aix en Provence) il monte un spectacle présenté comme le « Puy du Fou provençal » il y exalte la Provence blanche, royaliste et catholique.

En 2023, Vianney d’Alençon rachète l’application « Voisins vigilants et solidaires », qui permet à quiconque de signaler n’importe où et n’importe quand un comportement qui lui semble suspect.

Le nouveau président de l’ESJ promet à ses futurs élèves des autoroutes de communications avec les médias détenus par les nouveaux propriétaires de l’école. Des autoroutes pour les stages, les alternances, l’emploi.

Cette volonté de faire main basse sur la profession est ironiquement épinglée par l’humoriste Wally Dia dans son dernier sketch sur « Médiapart » : « Avant Bolloré payait les journalistes pour les acheter, maintenant ce sont les apprentis journalistes qui vont payer Bolloré pour être achetés. »

Dernière information : après un débrayage d'une ampleur inédite le 28 novembre dernier ( Plus de 200 salariés de Bayard ont scandé "Pas de réacs dans nos rédacs, pas de fachos dans nos locaux !" devant le siège du groupe à Montrouge ) le nouveau président du directoire François Morinière a annoncé que la nomination d'Alban du Rostu était "annulée". outre le recrutement d'Alban du Rostu, l'annonce de la participation de Bayard au rachat de l'École Supérieure de Journalisme de Paris est aussi annulée. L'intersyndicale de Bayard a salué une "victoire sur toute la ligne".