Fascisme : pourquoi ça recommence (4)

par | 9 mars 2025 | Histoire

Au moment où de nouvelles formes de fascisme prospèrent dans le monde, je vous propose un tour d’horizon européen d’expériences fascistes, à partir de quelques dates clés. On commence par le cinquantième anniversaire de la mort de Franco en s’interrogeant sur son impunité.

1975, fin du franquisme ? Acte 4 : oubli et impunité

Quand il désigne l’amiral Luis Carrero Blanco (membre de l’Opus Dei) comme vice-président le 21 septembre 1967, Franco pense avoir assuré la continuité politique du régime.

Pour lui la continuité est selon ses propres mots : « atado y bien atado » (ficelée et bien ficelée).

Dans ce montage politique, l’infant Juan Carlos fait initialement office de caution. En juin 1973, le « caudillo » entérine le montage bicéphale, le pouvoir réel sera exercé par Carrero Blanco, la représentation du pouvoir sera exercée par Juan Carlos.

Mais tout ne se passe pas comme prévu, le 20 décembre 1973, l’ETA élimine Carrero Blanco dans un spectaculaire attentat. Pendant 2 ans un Franco agonisant va continuer à chercher la formule parfaite pour maintenir la dictature.

Dans cette guerre interne de succession, Juan Carlos passe insensiblement de l’ombre à la lumière.

La mort de Franco le 20 novembre 1975, laisse un paysage politique délabré. Aux luttes de tendance dans le camp franquiste, se superposent les abandons de la gauche institutionnelle (adoption du drapeau sang et or du franquisme, fin de l’exigence d’un rétablissement de la république, acceptation de la monarchie).

La refondation de la nation espagnole butte toujours sur les mêmes écueils et porte comme une croix sa contradiction originelle : comment rompre avec un passé d’affrontements ? comment réformer le franquisme ? le franquisme est-il soluble de l’intérieur ou de l’extérieur ?

À droite, deux hommes issus du sérail franquiste vont manœuvrer quasiment à tâtons et de manière erratique, Adolfo Suarez et Juan Carlos. Ils vont naviguer entre les ultras du régime et une frange libérale embryonnaire.

À gauche, PCE et PSOE poursuivent leur dérive révisionniste. Ils pensent qu’une fois légalisés ils accèderont au pouvoir et réaliseront les changements nécessaires.

Droite et gauche ne proposent pas une rupture institutionnelle et juridique franche avec le franquisme, mais une prise de distance graduelle, texte de loi par texte de loi.

Cette stratégie des petits pas et de la chèvre et du chou aboutit à l’adoption d’une nouvelle Constitution le 6 décembre 1978, soit 3 ans après la mort de Franco.

Cette Constitution se fonde sur l’amnistie mutuelle d’octobre 1977 qui est de fait l’autoamnistie des dirigeants franquistes de leurs crimes.

Fait notable dans le débat à gauche entre manœuvre d’appareil et mobilisation populaire, cette évolution se réalise à la suite de mobilisations monstres. Ces mobilisations se réalisent alors qu’elles sont officiellement interdites et que le nombre d’interpellations pour délit politique connait une hausse spectaculaire (plus de 40 % entre 1975 et 1977).

Les séries de grâce et d’amnistie qui se succèdent n’étanchent pas la soif démocratique des manifestants. Ce, même si la quasi-totalité des prisonniers politiques est libérée.

En vidant les prisons franquistes de leurs détenus, la droite amnistie aussi les crimes de sang et les délits commis par les agents de l’État contre l’opposition antifranquiste.

En votant la nouvelle constitution de 1978, la droite et la gauche institutionnelle annoncent avec emphase que le « mythe » des deux Espagne irréconciliables est à jamais enterré, que le dissensus laisse la place au consensus.

Dans les faits cette nouvelle Constitution constitue un pacte d’oubli des crimes de la guerre civile et de la dictature. Elle institue l’impunité des prédateurs fascistes.

Face à ce « gel mémoriel », il faudra l’essor citoyen des mouvements civiques près de 25 ans plus tard, au début des années 2000 pour ouvrir la question des fosses communes.

Fosses communes où, dans presque tous les villages et villes de l’Espagne furent exécutés et entassés les victimes militaires et civiles du franquisme avant et après la guerre civile.

Ce rendez-vous avec les mouvements mémoriels clôturera la semaine prochaine cette série sur : « La fin du franquisme ».

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Didier Ribo

Description de l'auteur de l'article - co-fondateur du journal majoritaire de Béziers