« Le bruit qui circule, à savoir que les fascistes se dirigent sur Rome pour tenter un coup d’État, est dénué de tout fondement ».

Il Popolo d’Italia, rédacteur en chef Mussolini, 8 août 1922

Le socialisme est désormais à terre. Il ne se relèvera plus. Les escouades fascistes lui ont infligé un châtiment implacable, qu’elles n’ont même pas interrompu le 4 août quand l’Alliance du travail, défaite, a révoqué la grève générale légalitaire.

En vérité, elles se sont acharnées sur l’ennemi des jours et des jours durant : des centaines de coopératives, cercles, chambres du travail détruits dans tout le pays, de conseils municipaux socialistes, catholiques, républicains démissionnaires.

Mussolini a survolé l’Italie le 12 août, et l’on pouvait encore voir en Toscane, en Émilie, sur la plaine du Pô, la fumée des incendies.

Quarante-huit heures de matraquages et de crimes ont réussi là où un siècle de luttes a échoué.

Dans un article de La Giustizia le leader socialiste modéré Turati dresse le bulletin de la défaite : « Il faut avoir le courage de l’avouer, la grande grève légalitaire a été notre Caporetto. Nous sortons de ces épreuves totalement vaincus. Nous avons abattu notre dernière carte et nous avons perdu Milan et Gênes, qui apparaissaient comme les points invulnérables de notre résistance. La rafale fasciste cingle les villes principales avec la même violence destructrice. Il faut avoir le courage de le reconnaître : aujourd’hui, les fascistes sont les maîtres du terrain. S’ils le voulaient, ils pourraient continuer d’assener de formidables coups ».

Turati a raison, néanmoins son pessimisme est excessif. Désormais, il est inutile de frapper les socialistes ; désormais il ne reste plus que deux forces en lice, les fascistes et l’État libéral, et ce sera un duel à mort.

Mussolini patiente avant de porter son ultime coup.

Patienter, telle est la maxime qu’il convient de mettre en pratique.

Comme toujours du reste. Mais ça ne sera pas facile, ça ne l’est jamais.

Les squadristes veulent partir à l’assaut du pouvoir, ils évoquent un coup d’état, au parlement Arpinati a menacé un député communiste de son arme. Les huissiers ont réussi à l’arrêter avant qu’il ne s’en serve.

Mussolini tente toujours d’organiser militairement la milice fasciste.

Le congrès des leaders fascistes se tient à Milan le 13 août. Il y a là le Comité central, la direction du parti, le groupe parlementaire, la Confédérations des corporations, il y a là tous les chefs du fascisme.

Le dilemme est le suivant : insurrection ou prise légale du pouvoir à travers de nouvelles élections.

Avant de quitter la réunion, un sourire sournois sur les lèvres, Mussolini a dicté un communiqué de presse de la direction du parti fasciste.

La marche sur Rome, y dit-il, est « une rumeur privée de tout fondement ».

 

( Extraits de lecture du livre d’Antonio Scurati ‘’M’’ l’enfant du siècle aux éditions Les Arènes )

 

Chaque mardi en exclusivité sur EVAB, vous avez rendez-vous avec la série ‘’M’’ qui va vous faire revivre les évènements qui ont fondé le fascisme, en Italie, au siècle dernier.

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