À travers ce récit, nous découvrons à travers le regard de l’enfance, Béziers pendant la guerre, l’occupation et l’après-guerre.
L’auteur est le cadet d’une famille prolifique et pauvre. « Pauvre et honnête, tu pourras passer partout la tête haute », énonçait son père. Et il en fallait des principes moraux sous l’occupation pour résister à la tentation d’une petite « resquille » quand la famille avait faim. Mais tout n’est pas noir, il y a même Franz, le soldat allemand, fermier comme son père, avec lequel on partage les cerises et qui nous glisse délicatement une partie de ses rations. La guerre finie, la joie explose. Les chaises ressortent sur les trottoirs, l’accordéoniste fait danser dans les quartiers, des loteries proposent un kilo de sucre en gros lot. Le dimanche, les gens s’habillent pour « faire les allées ». Aux actualités cinématographiques, la ménagère américaine nous fait découvrir machine à laver, frigidaire et bigoudis chauffants. Puis arrive le temps de l’école qui ne sera pas glorieux. « Je venais d’un quartier “le four à chaux” qui distinguait (les mal lotis) aussi bien que “l’étoile jaune”. » Heureusement, à côté de ça, il y a les courses dans la campagne, la rivière, le maraudage et la séance de cinéma du dimanche après-midi avec les filles. Tout cela est joliment raconté, avec humour. Toute cette vie de voisinage, cette façon de lire les événements du monde vaut mieux qu’une laborieuse étude sociologique. J’ai adoré le passage sur l’annonce de la mort de Staline et celui du « four » essuyé par Juliette Gréco qui a suscité la colère des ouvriers et des viticulteurs aux arènes, avec sa chanson « Je hais les dimanches ».