Eugénie Grandet est un roman d’Honoré de Balzac paru (en volume) en 1834. Plusieurs adaptations pour le cinéma ont été réalisées mais seulement deux d'entre elles sont françaises.

On se rappelle en 1910 d'Eugénie Grandet, réalisé par Émile Chautard et Victorin Jasset. Vient de sortir sur les écrans une adaptation de Marc Dugain avec Joséphine Japy (Eugénie Grandet), Olivier Gourmet (Félix Grandet) et Valérie Bonneton (Madame Grandet).


Eugénie Grandet à la sauce Marc Dugain

Cette dernière transposition d'un roman au cinéma n'échappe pas à la règle du genre :
- le cinéma impose sa propre temporalité qui n'est pas celle du lecteur de l'œuvre écrite
- le réalisateur pratique des coupes dans l'œuvre originale et en réinterprète d'autres selon les contraintes propres au cinéma
- le cinéaste met en valeur des thématiques actuelles qui ne sont pas celles de l'auteur du roman (le féminisme d'Eugénie…)

Eugénie Grandet lue et mise en scène par Marc Dugain, c'est aussi et surtout un film plat et ennuyeux.

Le scénario est déroulé de manière uniforme et sans surprise, la mise en scène est "proprette", sans plus : un certain esthétisme et la qualité des deux principaux acteurs (Joséphine Japy (Eugénie Grandet) et Olivier Gourmet (Félix Grandet) ne rompent pas la monotonie de l'ensemble.

Pas une critique pour sauver ce film

Les critiques professionnels sont sévères :

Cahiers du cinéma (Marcos Uzal)
"Il faut reconnaître à Dugain que l'ennui que distille son adaptation est le fruit de son cran à tenter de filmer l'ennui - tâche bien difficile pour qui semble si peu attendre de la forme cinématographique."

Le Monde (Murielle Joudet)
"On peine à trouver ce qui, ici, fait cinéma tant tout y est purement illustratif."

Bref, on peut faire l'économie d'une place de cinéma pour aller voir ce film : relisez donc plutôt le roman de Balzac !

Une autre adaptation de Balzac : Les illusions perdues

En revanche, Les illusions perdues, dans une adaptation du même Balzac de Xavier Giannoli avec, dans les rôles principaux, Benjamin Voisin, Cécile de France, Vincent Lacoste, Xavier Dolan, Jeanne Balibar, Gérard Depardieu…film "grand public" mérite un peu plus d'attention.

EVAB Balzac au cinoche 2021.10.31 image 2

La critique de Marcos Uzal (Cahiers du cinéma n'invite guère à voir ce film : "Ce film participe à un dénigrement très actuel et général de l’information et de la critique, et il s’en dégage un petit parfum d’autant plus nauséeux que quasiment tout ce que le roman de Balzac contient de sentimentalement vibrant, trouble, déchirant, est évacué au profit de constantes torsions sur le présent."

Cependant, la reconstitution est somptueuse ; il s'agit d'une fresque et populaire et la critique des médias et des élites est féroce. La répartie des acteurs à l'occasion de joutes verbales invitent à un jeu communicatif…

À voir, donc, sans se bercer…d'illusions.